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L'enseignement primaire

COUR DES COMPTES

Le renforcement du capital humain constitue l’une des principales priorités en matière de politique structurelle, selon les recommandations de l’OCDE. L’expérience montre que l’éducation des enfants joue un rôle essentiel dans le développement des compétences nécessaires à un monde en constante évolution. Pourtant, malgré un investissement public conséquent (55,1 Md€ en 2023), les résultats des élèves français en CM1 restent préoccupants, notamment en mathématiques, domaine dans lequel la France se classe dernière parmi les pays de l’Union européenne et avant-dernière au sein de l’OCDE. Plusieurs dysfonctionnements structurels ont été identifiés, au premier rang desquels une aggravation des inégalités au cours de l’école primaire, une gouvernance de l’école encore trop centralisée, une organisation du temps scolaire en décalage avec les besoins des élèves, ainsi qu’un recul de l’attractivité du métier d’enseignant. Face à ces constats, la Cour des comptes formule plusieurs recommandations, axées sur le recrutement et la formation des enseignants, sur les usages pédagogiques, sur la réforme du statut des directeurs d’école, ainsi que sur la nécessité de mieux associer les collectivités territoriales à la politique éducative.

Des ambitions difficiles à concrétiser

L’échec scolaire constitue l’un des principaux facteurs d’inefficacité des systèmes éducatifs. Ses conséquences sont lourdes, tant pour les élèves, dont les perspectives d’emploi se réduisent, que pour la société, qui a besoin d’une population instruite pour stimuler l’innovation et soutenir la croissance économique. Malgré une hausse des dépenses consacrées à l’école primaire au cours des dix dernières années, les performances des élèves ont décliné, en particulier en mathématiques et en français. En 2023, seuls 2,5 % des élèves français étaient considérés comme « avancés » en mathématiques, contre une moyenne de 11,5 % dans les pays de l’OCDE. Cette situation est aggravée par de fortes disparités de niveau, notamment parmi les élèves les moins performants, souvent issus de milieux défavorisés. L’échec scolaire est ainsi étroitement lié aux inégalités sociales : 40 % des élèves de 6ème en grande difficulté appartiennent au groupe ayant l’indice de positionnement social le plus bas. Les experts soulignent l’importance d’une éducation précoce de qualité pour favoriser le développement cognitif et émotionnel des enfants. Or, ceux issus de contextes socio-économique modestes n’y ont pas toujours accès. En dépit des efforts entrepris, la France consacre une part inférieure de son PIB à l’enseignement primaire par rapport à d’autres pays de l’OCDE (1,3 % contre 1,5 % en moyenne). Par ailleurs, le pays peine à recruter et fidéliser les enseignants, ce qui accentue les inégalités territoriales. Enfin, l’Académie nationale de médecine alerte sur l’organisation du temps scolaire, notamment la semaine de quatre jours, jugée inadaptée aux rythmes des enfants et préjudiciable à leur bien-être comme à leurs apprentissages.

Une gouvernance à adapter aux défis de demain

En matière de gouvernance scolaire, les leviers d’action concernent principalement la fonction et le statut du directeur, ainsi que les missions qui lui sont attribuées. Le système actuel de décharge, devenu obsolète, freine le pilotage éducatif. Instituer un statut spécifique ou généraliser progressivement une décharge complète permettrait de clarifier sa position au sein de l’équipe pédagogique, de lui fournir les moyens nécessaires pour animer le projet éducatif et de renforcer ses relations avec les partenaires extérieurs. Cette évolution doit s’inscrire dans une démarche locale, prenant en compte les spécificités territoriales. Elle pourrait intégrer des modalités d’évaluation favorisant un dialogue structuré avec les autorités académiques, jusqu’à un contrat d’objectifs et de moyens dans les établissements les plus importants. Cette approche pourrait s’appuyer sur le conseil d’évaluation. Il est également essentiel de renforcer la coopération entre les services de l’Éducation nationale et les collectivités. Pour répondre aux enjeux de moyen et long terme – évolution des bâtiments scolaires, gestion des ressources humaines et suivi financier –, la stabilité et la visibilité des politiques publiques sont cruciales.
Malgré la diminution des effectifs, les dépenses liées au primaire continuent d’augmenter. En 2022, l’État a consacré 20,1 Md€ au premier degré, principalement pour les personnels, tandis que les collectivités territoriales ont investi 19 Md€ hors pensions dans cette politique publique. Les ménages et acteurs privés ont contribué à hauteur de 3 Md€, notamment pour la restauration scolaire et les frais annexes. La dépense totale pour l’école primaire atteint ainsi 52 Md€, soit 2 % du PIB. Cette estimation reste approximative, car il est difficile de mesurer précisément la ventilation des dépenses entre les collectivités et les ménages.

La baisse attendue des effectifs : une opportunité pour redéfinir l’école en fonction du bien-être des élèves

La réduction attendue des effectifs scolaires ouvre une voie pour repenser le modèle éducatif et le transformer en un véritable levier d’amélioration. Trois grandes orientations se dessinent. La première est de placer le bien-être des élèves au cœur des initiatives. Il s’agit de garantir une meilleure cohérence entre les activités scolaires, périscolaires et extrascolaires, tout en prenant en compte les besoins globaux de l’enfant. Les recherches menées par l’OCDE, ainsi que les avancées en neurosciences et en économie, démontrent qu’un environnement éducatif de qualité favorise un meilleur développement des enfants, en particulier ceux issus de milieux défavorisés. La seconde orientation réside dans l’exploitation des outils numériques au service de de l’enseignement. Cela suppose de renforcer la coopération autour de projets pédagogiques numériques et d’assurer la formation des équipes éducatives à ces sujets et outils. Enfin, la troisième orientation identifiée est la transition écologique, en particulier l’adaptation des infrastructures pour répondre aux enjeux environnementaux et au bien-être des élèves. Cela implique de coordonner les responsabilités, de quantifier les besoins et les financements, et de transformer les bâtiments scolaires en lieux d’éveil, d’apprentissage et d’ouverture. L’objectif est de rendre ces espaces polyvalents, en améliorant également les extérieurs, comme les cours de récréation, pour qu’ils deviennent des lieux d’épanouissement et de socialisation.

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